Chapitre 10.

Titre
In che modo le forze de tutti i Principati si debbino misurare Cap .X.
Jacques de Vintimille Guillaume Cappel Gaspard d'Auvergne Jacques Gohory
En quelle manière l'on doibt examiner les forces de toutes les principautez. Chapitre X Comme les forces de toutes les Principautéz se doivent estimer et mesurer Chap. 10. Comme les forces de toutes les Principautez se doivent mesurer. Chapitre X. En quelle maniere les forces de toutes Principautez se doivent mesurer. Chapitre 10.



Segment 1
Conviene haver' nel' esaminare la qualità di questi Principati un'altra consideratione, cioè se un' Principe ha tanto stato che possa, bisognando, per se medesimo reggersi o vero se ha sempre necessità della defension' d'altri.
Jacques de Vintimille Guillaume Cappel Gaspard d'Auvergne Jacques Gohory
Il convient avoir, pour bien examiner la nature de ces principaultéz, une aultre considération. Cestassavoir si ung prince a si grand estat qu'il se puisse deffendre de tout ennemy de soy mesme sans secour daultruy, ou voyrement s'il a tousjours besoing qu'ung aultre le défende. Pour bien iuger et bien examiner la qualite de ces principautez il convient avoir une autre consideration, c'est asçavoir si un Prince est si puissant qu'il puisse en un besoing se gouverner par soy mesmes, ou bien s'il a tousiours affaire de la defence et protection d'autruy. Il faut encores avoir une autre consideration en examinant la qualité de ces Princes : C'est a sçavoir si un seigneur est si grand terrien que de luy mesmes il puisse remedier aux affaires, qui adviennent : ou bien s'il a pour se faire, mestier du secours d'autruy. Pour bien iuger & examiner la qualité de ces principautez il convient avoir une autre consideration, c'est asavoir si un Prince est si puissant qu'il puisse en un besoin se conduire de luy mesme, ou bien s'il a tousiours affaire de la defence & protection d'autruy.



Segment 2
Et per chiarir' meglio questa parte, dico com' io giudico potersi coloro regger' per se medesimi che possono, o per abundantia de huomini o di denar', metter' insieme uno esercito giusto et far' una giornata con qualunche li viene assaltare.
Jacques de Vintimille Guillaume Cappel Gaspard d'Auvergne Jacques Gohory
Pour laquelle différence bien déclairer je dis que ceulx là se peuvent fyer à eulx mesmes, qui peuvent avec suffisante quantité de gensdarmes du pays ou à force de deniers assembler une bonne armée, et faire une journée de bataille contre quelconque ennemy qui les assailliroit. Et pour mieux declarer cette partie, ie di que ceux se peuvent, comme ie pense, regir et maintenir eux mesmes qui ont puissance a force d'hommes ou d'argent mettre aux champs un ost bien fourni et donner iournee contre celuy qui le viendra assaillir, quiconques soit il, Et pour mieux esclarcir ce propos, ie dy, que tout ainsi, que i'estime ceux se pouvoir maintenir d'eux mesmes, qui ont le moyen, pour estre abondans en hommes, et deniers, mettre sur les champs une iuste armée, et donner iournée à quiconque les viendra assaillir : Et pour mieux declarer cette partie, ie di que ceux se peuvent (comme i'estime) regir & maintenir eux-mesmes qui ont puissance a force d'hommes ou d'argent de mettre aux champs un ost bien fourny & donner iournée contre celuy qui le viendra assaillir, quinconques soit il,



Segment 3
Et così giudico coloro haver' sempre necessità d'altri che non posson' comparir' contro gli nimici in campagna, ma sono necessitati rifugirse drento a le mura et guardar' quelle.
Jacques de Vintimille Guillaume Cappel Gaspard d'Auvergne Jacques Gohory
Et semblablement j'estime que ceulx là ont besoing dautruy, qui ne se peuvent mettre aux champs, ains sont contraictz de se retirer dans les villes et garder les murailles. aussi i'estime ceux estre tousiours en necessite d'autruy qui ne peuvent comparoir en la campagne contre les ennemis mais sont contrains de se retirer aux villes et se garder de murailles. Semblablement ie repute ceux avoit tousiours besoing de l'aide de leurs voisins, qui ne s'osent monstrer en campagne contre la face des ennemis, mais sont forcez chercher leur refuge au dedans des places fortes, pour les garder. aussi i'estime ceux estre tousiours en necessité d'autruy qui ne peuvent comparoir en campagne contre leurs ennemis mais sont contraints de se retirer es villes & se garentir de murailles.



Segment 4
Nel' primo caso, s' è discorso et per l' avenire diremo quello che n' occorre.
Jacques de Vintimille Guillaume Cappel Gaspard d'Auvergne Jacques Gohory
Des premiers nous en avons assez longuement discouru, et par cy après en toucherons quelque chose, selon ce qu'il nous viendra à propos. Le premier article nous l'avons discouru et par ci apres nous en dirons comme il s'offrira. Nous avons desia parlé des premiers, et en traitterons quelquefois plus amplement ou la commodité s'offrira. Le premier article nous havons discouru & cy aprez nous en toucherons encor ainsi qu'il s'offrira.



Segment 5
Nel' secondo caso, non si può dir' altro, salvo che confortar' tal' Principi a munir' et fortificar' la terra propria, et del' paese non tener' alcun' conto.
Jacques de Vintimille Guillaume Cappel Gaspard d'Auvergne Jacques Gohory
Des aultres je diz que l'on ne pourroit donner aultre remède, que les conseiller de bien munir et fortifier leurs villes en toutes sortes, et ne tenir pas grand compte du plat pays. Du second on n'en peut dire autre chose, que conseiller a telz Princes de munir et fortifier leurs villes, et ne tenir point grand conte du plat païs. Quant aux autres, ie n'en puis dire aucune chose, fors d'admonester semblables Princes à munir, et fortifier leur ville capitalle, sans se soulcier beaucoup du plat païs. Du second on n'en peut dire autre chose, que conseiller a telz Princes de munir & fortifier leur villes, & ne tenir pas grand conte du plat païs.



Segment 6
Et qualunche harà ben' fortificata la sua terra, et circa gli altri governi coi sudditi si sia maneggiato come disopra è detto et disotto si dirà, sarà sempre assaltato con gran respetto, perche gli huomini son' sempre inimici delle imprese dove si vegga difficultà, ne si può veder facilità assaltando uno che habbi la sua terra gagliarda et non sia odiato dal' popolo.
Jacques de Vintimille Guillaume Cappel Gaspard d'Auvergne Jacques Gohory
Car quiconque aura une ville bien fortifiée, et se sera bien porté touchant le gouvernement de ses subjectz, qu'il se tienne seur de n'estre assailly, sinon avec grand esgard et difficulté. Pource que les hommes sont tousjours ennemys des entreprinses, où ilz voyent aucune difficulté, certainement l'on ne peult trouver facilité aucune à assaillir ung prince qui ayt sa ville bien forte et bien remparée, et qui soit au demourant bien aymé du peuple. Tellement que quiconques aura bien fortifie ses places et quand aux autres manimens, d'affaires se sera porte comme nous avons dessus dit et dirons encores apres on ne l'assaudra qu'avec grand respect. Car on ne fait point voluntiers entreprises ausquelles on veoit de la difficulte, or n'y a pas peu d'affaire d'assaillir un qui ait sa ville bien munie et ne soit point hay du peuple. Et quiconque le fera ainsi, se gouvernant au reste de ses affaires envers ses subietz, comme i'ay icy devant remonstré, et diray cy apres, ceux qui le voudront assaillir, y penseront deux fois avant, que de commencer, consideré que les hommes sont tousiours volontiers contraires aux entreprises d'extreme difficulté. Et de fait ie ne sçay, qui estimera facile mener la guerre contre celuy, qui est en forteresse bien remparée, n'estant point mal voulu de son peuple. Tellement que quiconques aura bien fortifié ses places & quand aux autres manimens d'affaires se sera porté comme nous avons dessus dit & dirons encores apres, on ne l'assaudra qu'avec grand respect. Car on ne fait point voluntiers d'entreprises esquelles on veoit beaucoup de la difficulté, or n'y a pas peu d'affaire a assaillir celuy qui ha sa place bien munie & n'est point malvoulu de son peuple.



Segment 7
Le Città d' Alamagna sono liberalissime, hanno poco contado et obediscono a lo Imperadore quando le vogliono, et non temono ne quello ne altro potente che l'habbino intorno.
Jacques de Vintimille Guillaume Cappel Gaspard d'Auvergne Jacques Gohory
Les citez d'Allemaigne sont libres au possible, elles ont peu de pays alentour, et obéyssent à l'empereur quand il leur plaist, et ne craignent ny luy ny aucun autre seigneur qui soyt entour d'eux, Les villes d'Alemagne sont en grand liberte elles ont bien peu de païs, et obeissent a l'Empereur quand il leur plaist, et ne craingnants ne l'un ne l'autre de leur voisins pour puissant qu'il soit. Les villes d'Allemagne sont fort libres, et si ont petite estendue de seigneurie hors leur murailles. Elles obeissent à l'Empereur quand il leur plaist, et ne le craignent ne luy ny autre potentat, qui leur soit voisin : Les villes d'Alemagne sont en grande liberté elles ont bien peu de païs, & obeissent a l'Empereur quand il leur plaist, & ne craignent nul de leurs voisins pour puissance qu'il ayt.



Segment 8
Perche le sono in modo fortificate che ciascun pensa la espugnation' d'esse dover' esser' tediosa et difficile, perche tutte hanno fossi et mura convenienti, hanno artiglieria a sufficientia, et tengon' sempre nelle Canove publiche da mangiar' et da bere et da arder' per uno anno.
Jacques de Vintimille Guillaume Cappel Gaspard d'Auvergne Jacques Gohory
et ce acause qu'elles sont fortifiées en telle sorte, que chacun pense la prinse dicelles debvoir estre difficile et fascheuse. Car elles ont toutes leurs murailles et fossez convenables, de l'artillerie à suffisance et tiennent ez magasins et caves publiques à manger, boyre et brusler pour ung an, Car elles sont fortifiees en sorte que chacun pense que se doit estre une chose bien longue et fascheuse de les prendre, d'autant qu'elles ont toutes fosses et murs suffisans, de l'artillerie grand quantite, et tousiours en leur magazins communs provisions a manger a boire et a bruler pour un an. parce qu'elles sont tellement fortes, qu'un chacun estime l'expugnation en devoir estre merveilleusement ennuyeuse, et difficile, estans toutes garnies de fossez, murailles, et d'artillerie a suffisance, tenans tousiours en leurs greniers publiques provision de blez, vins, et bois, assez pour une année. Car elles sont fortifiées en sorte que chacun pense que se doibt estre une chose bien longue & penible à les emporter, d'autant qu'elles ont toutes fossez & murs suffisans, de l'artillerie grande quantité & tousiours en leurs magazins communs provisions a manger a boire & a bruler pour un an.



Segment 9
Oltre a questo, per poter' tener' la plebe pasciuta et senza perdita del' publico, hanno sempre in commune per un' anno da poter' dar' lor' da lavorar' in quelli esercitij che siano il nervo et la vita di quella Città et de l'industria de quali la plebe si pasca. Tengon' ancora li esercitij militari in reputatione et sopra questo hanno molti ordini a mantenerli.
Jacques de Vintimille Guillaume Cappel Gaspard d'Auvergne Jacques Gohory
et d'abondant pour entretenir le menu peuple nourry, sans l'intérest du publicq, ilz ont tousjours en communaulté assez de bésongne pour ung an, pour les faire travailler ez mestiers, qui sont le nerf et la vye dicelle cité, desquelz le populaire gaigne sa nourriture. Davantaige ilz ont le faict de guerre en honneur, et sur ce ont des ordres biens bons à le maintenir. Oultre ce que pour pouvoir entretenir le menu peuple sans nul dechet ou perte du bien public elles ont tousiours en commun dequoy nourrir luy donnant de la besongne en ces mestiers qui sont les nerfz et la vie de la ville et par le moyen desquelz le menu peuple vive. Encore tiennent ilz en grand honneur les exercices de la guerre et ont beaucoup de bonnes manieres de faire pour les maintenir. D'advantage à fin de donner moyen de vivre au menu peuple, et sans dommager le publiq'ilz ne faillent iamais d'avoir en commun matieres, pour le pouvoir toute l'année mettre en besoigne aux ouvrages des choses, qui renforçent, et entretiennent leur cité : tant que de ceste industrie la petite commune se nourrist, et si pratiquent les exercices militaires, sur lesquelz ilz ont plusieurs statuz, et ordonnances, qu'ilz observent ceremonieusement. Outre ce que pour pouoir entretenir le menu peuple sans nul diminution ou perte du bien public, elles ont tousiours en commun dequoy nourrir luy donnant de la besongne en ces mestiers qui sont les nerfz, & la vie de la ville & par le moyen desquelz le menu peuple vive. Encore tiennent ils en grand honneur les exercices de la guerre & ont beaucoup de bonnes manieres de faire, pour les entretenir.



Segment 10
Un' Principe adunque che habbia una Città forte et non si facci odiare, et non può esser' assaltato, et, se pur' fossi chi l' assaltassi, se ne partirebbe con vergogna, perche le cose del' mondo son' sì varie che gli è quasi impossibile che un' possi con l'eserciti stare un' anno ocioso a campeggiarlo.
Jacques de Vintimille Guillaume Cappel Gaspard d'Auvergne Jacques Gohory
Parquoy un prince qui a une forte cité, et ne se face hayr, ne peult estre assailly, et s'il se trouvoit aucun qui le voulsist assaillir, il est certain qu'il se retireroit à son déshonneur, pource que les choses mondaines sont si doubteuses et variables, qu'il est quasi impossible qu'un prince avec ses armées puisse demourer tout un an campé contre ung aultre au siège d'une ville. Un Prince donc qui ait une ville forte et ne se face point hair de ses subiectz ne peut estre assailli, et bien qu'il y eust quelcun qui vousist entreprendre de l'envahir, il seroit a la fin contrainct de s'en partir avec sa courte honte. Car en ce monde les affaires sont tant incertaines qu'il est quasi impossible qu'un homme puisse avec un camp estre un an au siege d'une ville sans rien faire. Le Prince doncq qui aura une cité forte, et ne se fera point haïr des siens, ne peut estre assailly, et quand ores il le seroit, l'aggresseur se voirra finablement contraint d'en partir à sa honte : attendu que les affaires de ce monde sont si divers, qu'il est presque impossible, qu'un chef de guerre puisse revenir l'espace d'un an son armée ocieuse, devant une place assiegée. Un Prince donc qui ayt une ville forte & ne se fasse point hair de ses sujetz ne peut estre assailli, & bien qu'il y eust quelqu'un qui vousist entreprendre de l'envahir, il seroit à la fin contraint de s'en partir avec sa courte honte. Car en ce monde les affaires sont tant incertains & variables qu'il est quasi impossible qu'un homme puisse avec un camp estre un an au siege d'une ville sans rien faire.



Segment 11
Et chi replicasse: se il popolo harà le sue possessioni fuor' et veggal' ardere non harà patientia, et il lungo assedio et la charità propria gli farà dimenticare el Principe. Rispondo che un' Principe potente, animoso, supererà sempre quelle difficultà dando hora speranza a sudditi chel' mal' non sia lungo, hora timore de la crudeltà del' nimico, hora assicurandosi con destreza di quelli che gli paresseno troppo arditi.
Jacques de Vintimille Guillaume Cappel Gaspard d'Auvergne Jacques Gohory
Si aucun me réplicquoit que le peuple voyant brusler et gaster le plat pays, où sont ses biens et possessions, n'auroit plus de patience, et que la longueur du siège et sa propre charité luy feroit mectre le prince en oubly, je respondroys qu'ung puissant prince et courageux viendra tousjours au dessus de telles difficultez, une foys en donnant espérance à ses subjectz que ceste tempeste ne sera durable, l'autre en les espoventant de la cruaulté de l'ennemy, ou en chastiant par subtil moyen ceulx qui luy sembleroient trop hardyz à murmurer. Si on me replique, que le peuple aiant des biens et metairies au champs voit qu'on les mete a sac il ne le pourra endurer, ou que le long assaut et le prouffit particulier luy face oublier son Prince. Ie respons a cela qu'un Prince puissant et courageux surmontera tous ses empeschemens, maintenant donnant esperance a ses subiectz que le mal ne durera pas, maintenant crainte de la cruaulte de l'ennemi, aucunefois chastiant finement ceux qui luy sembleront estre trop hardiz. Et si lon me repliquoit, que le Peuple n'aura iamais patience voyant ses biens, et possessions estre brulées sur les champs, tant que le long siege, et amour de soy seront en danger, de luy faire oblier son Prince : ma responce sera qu'un prudent et courageux seigneur demeslera tousiours ces perplexitez, donnant maintenant esperance à ses subietz de la prochaine issue du mal, maintenant crainte de la cruauté de l'ennemy, et donnant ordre avecques prompte dexterité à ceux qui luy sembleront un peu trop hardis, et inclinez à la rebellion. Si on me replique, que le peuple ayant des biens & metairies au champs veoit qu'on les mette a sac il ne le pourra endurer, ou que le long siege & le proufit particulier luy fasse oublier son Prince. Ie respons à cela qu'un Prince puissant & courageux surmontera toutes ces difficultez, maintenant donnant esperance à ses sujetz que le mal ne durera pas, maintenant crainte de la cruauté de l'ennemy, aucunefois chastiant finement ceux qui luy sembleront estre trop hardiz.



Segment 12
Oltre questo il nimico deve ragionevolmente arder' et rovinar' el paese loro in sù la gionta sua et ne tempi quando li animi de gli huomini sono ancora caldi et volonterosi a la difesa, et però tanto meno il Principe deve dubitare, perche doppò qualche giorno, che gli animi sono raffredi, sono digia fatti i danni, son' ricevuti i mali et non v' è più rimedio.
Jacques de Vintimille Guillaume Cappel Gaspard d'Auvergne Jacques Gohory
Oulstre ce communément tout ennemy sur sa première arrivée brusle et gaste le pays, où il entre lors que les hommes sont encore chauldz et promptz à défendre leur prince. Au moyen dequoy il se doibt moins deffier d'eulx, à cause que quelques jours après que les cueurs sont refroidiz, les ennemyz ont faict du piz qu'ilz ont peu, le peuple a souffert tous les maulx du monde, et voit bien qu'il n'y a plus de remède. Avec ce que l'ennemi doit selon raison bruler et gaster le païs au commencement qu'il y arrive et quand les hommes sont chaux et ont bon cœur ilz se defendent voluntiers, et pource tant moins un Prince se doit deffier : quelque temps apres les courages sont rafroidis d'autant que le dommage est fait, les maux sont receus, et n'y a plus de remede. Et qui plus est, la coustume des ennemis est brusler, et gaster tout le païs à leur premiere arrivée, et au temps que les courages des hommes sont encores chautz, et ardans a la resistance. Parquoy un Prince se doit moins travailler l'esprit de celà, parce que les pertes, et dommages sont desia faitz, et les maux receus, sans qu'il y aye plus de remede, avant que les coeurs du peuple se commancent à refroidir, et s'en resentir. Avec ce que l'ennemy doibt selon raison bruler & gaster le pays au commencement qu'il y arrive & quand les hommes sont chaudz & ont bon cueur ils se defendent voluntiers, & pource tant moins un Prince se doit defier : quelque temps aprez les courages sont refroidis d'autant que le dommage est fait, les maux sont receus & n'y a plus de remede.



Segment 13
Et al'hora tanto più si vengono ad unir' collor' Principe, parendo che esso habbia con loro obligo, essendo state loro arse le case, et rovinate le possessioni per la difesa sua. Et la natura de gli huomini è così obligarsi per li beneficij che essi fanno, come per quelli che essi ricevono.
Jacques de Vintimille Guillaume Cappel Gaspard d'Auvergne Jacques Gohory
Dont il advient qu'ilz se joignent d'autant plus à leur prince, et semble qu'il soit en partie obligé à eulx, de ce que leurs maisons ont estés pour luy bruslées, et leurs possessions gastées pour sa deffense. Car la nature des hommes est telle qu'ilz s'obligent autant à aultruy pour les biens et services qui luy font, comme pour ceulx qui reçoivent de luy. Car alors tant plus ilz se viennent accorder et assembler avec leur Prince, leur estant advis qu'il soit fort tenu et oblige a eux, pour ce qu'a son occasion et pour le deffendre leurs maisons ont este destruites et leur terres saccagees. Car les hommes sont de ceste nature de s'obliger et sçavoir bon gre aussi tost pour les plaisirs qu'ilz ont faicts, comme pour ceux qu'ilz ont receus. Et alors tant plus fort se reünist il, et approche de son seigneur, le pensant avoir grandement obligé à soy, de voir leurs maisons arses, et possessions champestres destruites pour sa defense. Car le naturel des personnes est de sçavoir autant bon gré a ceux, qui leur sont tenus pour service fait, qu'aux autres de qui ilz ont reçeu plaisir. Car alors tant plus ils se viennent accorder & assembler avec leur Prince, leur estant avis qu'il soit fort tenu & obligé a eux, pource qu'à son occasion & pour sa defence leur maisons ont esté destruittes & leur terres saccagées. Car les hommes sont de cette nature de s'obliger & savoir bon gré autant pour les plaisirs qu'ils ont faits que pour ceux qu'ils ont receuz.



Segment 14
Onde se si considera ben' tutto, non fia difficile a un' Principe prudente tenere, prima et poi, fermi l'animi de suoi Cittadini ne la' ossidione, quando non gli manchi da viver' ne da difendersi.
Jacques de Vintimille Guillaume Cappel Gaspard d'Auvergne Jacques Gohory
Parquoy si l'on considère bien à tout, il ne sera malaisé à un prudent prince d'entretenir avant et après telz inconvenientz les cueurs des citoyens en amour et fermeté, à supporter le siège des ennemyz pourveu qu'il ayt de quoy vivre et de quoy se deffendre. Doncques tout bien advise, il ne sera pas difficile a un Prince qui soit sage de tenir premierement, et puis asseurer ses gens a la deffence de sa ville quand il aura vivres et munitions. Et parainsi considerant bien le tout, il ne sera point malaisé à un sage Prince entretenir du commancement, et apres, le courage de ses subietz à la longueur du siegé, pourveu que les vivres, et moyens de se defendre ne luy defaillent point. Donques tout bien avisé : il ne sera pas difficile a un Prince prudent de tenir premierement, & puis assurer ses gens à la deffence de sa ville quand il aura vivres & munitions.