1 : Ie laisseray en arriere le discours des republiques que i'ay faict autrefois bien ample,
2 : ie me rengeray seulement aux Principautez (en retissant les trames ourdies cy dessus) à disputer par quelle maniere elles se peuvent gouverner & maintenir.
3 : Ie dy doncques que es estats hereditaires & accoustumez à la race de leurs Princes, y a beaucoup moindre difficulté à les conserver qu'es nouveaux : d'autant qu'il y suffit de ne transgresser & enfraindre l'ordre des ancestres, & apres temporiser selon les cas qui surviendront : de sorte que si un tel Prince est d'industrie ordinaire, il se maintiendra tousiours en son estat, s'il n'y a force extraordinaire & excessive qui l'en prive. Et s'il en est dechassé, par tant soit peu de fortune adverse, qui avienne à celuy qui l'aura occupé, il y rentrera aysement.
4 : Pour exemple nous avons en Italie le Duc de Ferrare, lequel ne tint iamais bon contre les assaults des Venitiens, l'an cinq cens quatre vingts & quatre, ny contre ceux du Pape Iules, l'an cinq cens quatre vingts & dix, par autre moyen que d'estre fondé en longue possession de la Seigneurie :
5 : pource que le Prince naturel n'a pas tant de causes ne de necessité d'offenser ses suiects : dont y a occasion qu'il soit plus aimé : Et si ses vices trop exorbitans ne le mettent en haine de son peuple, raison veult que naturellement il soit bien voulu :
6 : d'autant que longue continuation d'un regne estaint l'occasion & memoire du remuëment de mesnage, à raison qu'une mutation laisse tousiours une attente pour en rebastir une autre.