Chapitre 11.

Titre
De principati ecclesiastici Cap .XI.
Jacques de Vintimille Guillaume Cappel Gaspard d'Auvergne Jacques Gohory
Des principautez d'Église. Chapitre XI De la principauté de l'eglise Chap. 11. Des principautez Ecclesiastiques. Chap. XI. De la principauté de l'Eglise. Chap. 11.



Segment 1
Restaci solamente al' presente a' ragionare de' Principati Ecclesiastici, circa quali tutte le difficultà sono avanti che si possegghino, perche s'acquistano o per Virtù o per Fortuna, et senza l'una et l'altra si mantengono, perche sono sustentati dagli ordini antichati ne la religione, quali sono tutti tanto potenti et di qualità che tengono i lor' Principi in stato in qualunche modo si procedino et vivino.
Jacques de Vintimille Guillaume Cappel Gaspard d'Auvergne Jacques Gohory
Il ne reste sur ceste matière qu'à parler des principaultez d'esglise, esquelles il n'y a aucune difficulté sinon celle qui est auparavant qu'on se soyt saisy de la possession dicelles. Elles s'equestent ou par vertu ou par fortune, et toutefoys il est aysé de les maintenir sans toutes deux. Car l'on se soustient en estat par les ordres qui sont de toute ancienneté tenuz en la religion, lesquelz sont de si grande puissance et de telle qualité, qu'ilz tiennent leurs princes en estat, en quelconquz manière qu'ilz veuillent vivre, ou gouverner, sans aucune contradiction. Il ne reste plus a parler pour le present que des principautez ecclesiastiques, esquelles toute la difficulte est avant qu'on les tienne. Car elles s'acquierent ou par vertu, ou par fortune, et se maintiennent sans l'une ny sans l'autre. Car elles sont soutenues d'une grande anciennete qui est aux ordres de la religion, lequelz sont si puissans et de telle qualite qu'ilz tiennent leurs maistres en estat en quelque sorte que se soit qu'ilz si portent et qu'ilz vivent. Il reste seullement en cest endroit deviser des Principautez Ecclesiastiques, autour desquelles n'y a difficulté, sinon durant la poursuitte d'y parvenir : dautant qu'elles s'acquierent, ou par vertu, ou par fortune, et se conservent sans l'une, ne l'autre, estans assez soustenues par les statuz inveterez en la religion Chrestienne, lesquelz sont tous de telle puissance et authorité, qu'ilz maintiennent d'eux mesmes leurs prelatz en possession paisible de leurs estatz, quelque mode de faire ou vivre qu'ilz tiennent. Il ne reste plus à parler pour le present que des principautez ecclesiastiques, esquelles toute la difficulté est avant qu'on les tienne. Car elles s'acquierent ou par vertu ou par fortune & se maintiennent sans l'une ne l'autre. Car elles sont soustenuës d'une grande ancienneté qui est és ordres de la religion, lesquelz sont si puissans & de telle qualité qu'ils tiennent leurs maistres en estat en quelque sorte que se soit qu'ils si portent & qu'ils vivent.



Segment 2
Costoro soli hanno stato et non lo difendano, hanno sudditi et non gli governano;
Jacques de Vintimille Guillaume Cappel Gaspard d'Auvergne Jacques Gohory
Entre tous les seigneurs du monde les princes d'esglise tant seullement ont estat et ne le deffendent, ont subiectz et ne les gouvernent, Ceux la seulement ont des païs et ne le defendent point, ilz ont des subiectz et ne les gouvernent point, Ceste seule sorte de gens ont seigneuries, et ne les defendent point : ont subietz, et ne les gouvernent point. Ceux-là seulement ont des païs & ne les defendent point, ils ont des sujetz & ne les gouvernent point :



Segment 3
et gli stati, per esser' indifesi, non son' lor' tolti, et li sudditi per non esser' governati, non se ne curano, ne pensano, ne posson' alienarsi da loro.
Jacques de Vintimille Guillaume Cappel Gaspard d'Auvergne Jacques Gohory
et les estatz ne leur sont ostez, pource aussy qu'ilz ne sont deffenduz, et les subiectz n'en ont aucune cure, pource qu'ilz ne sont pas eulx gouvernez, et ne pensent jamais à révolter ny à se soubstraire d'eulx. et pource qu'ilz ne defendent point leurs estatz, on ne leur oste point, et d'autant qu'ilz ne gouvernent point leur subiectz ilz ne s'en soucient point, ny pensent ny peuvent s'aliener de leur gouvernement. Et toutesfois leurs seigneuries ne leur sont iamais ostées, encores que iamais on ne les defende, ny n'ont soucy leurs subietz si on les laisse sans gouvernement. Lesquelz ne pensent, et ores quand ilz le penseroient, ne peuvent s'alliener aucunement de leurs superieurs. & pource qu'ils ne defendent point leurs estats, on ne leur oste point, & d'autant qu'ils ne gouvernent point leurs sujetz ilz ne s'en soucient point, ne pensent ne peuvent soy soustraire de leur gouvernement.



Segment 4
Solo adunque questi Principati son' securi et felici, ma essendo quelli retti da cagioni superiori a le quali mente humana non aggiugne, lascerò il parlarne, perche, essendo esaltati et mantenuti da Dio, sarebbe officio d' huomo presuntuoso et temerario el discorrerne.
Jacques de Vintimille Guillaume Cappel Gaspard d'Auvergne Jacques Gohory
Tellement qu'il fault juger que se sont les plus heureux et asseurez princes du monde. Laquelle chose advient de ce qu'ilz sont dressez par causes supérieures, ausquelles l'esprit humain ne peult parvenir, mais à cause que Dieu est celuy qui les exalte et maintient en felicité, se seroit office d'homme oultrecuidé et temeraire, d'en vouloir discourir, et n'en parleray aucunement. Ces principautez la donc seulement sont seures et heureuses, mais pource que cela est gouverne de causes superieures ausquelles l'esprit humain n'y peut advenir, ie laisseray d'en parler, car estans elevees et maintenues de Dieu seroit bien a faire a un homme temeraire d'en discourir. Ces seules principautez sont doncques asseurées et heureuses : mais au moyen de ce qu'elles sont conduites, et guidées par divins iugemens, dont l'esprit, et sens humain ne peut approcher, ie me deporteray d'en parler : parce qu'estans exaltées, et entretenues de Dieu, seroit l'acte d'un homme presumptueux, et temeraire, d'en vouloir faire discours. Ces principautez donc seules sont sures & heureuses, mais pource que cela est gouverné des causes superieures ausquelles l'esperit humain ne peut attaindre, ie laisseray d'en parler, car estant elevées & maintenues de Dieu seroit un tour d'homme temeraire d'en discourir.



Segment 5
Nondimanco se alcuno mi ricercasse donde viene che la Chiesa nel' temporale sia venuta a tanta grandeza (con cio sia che da Alessandro indrieto i potentati Italiani, et non solamente quelli che si chiamano potentati, ma ogni Barone et Signore benche mimino quanto al temporale, la stimava poco, et hora un' Re di Francia ne trema, et l' ha possuto cavare d' Italia et rovinar' i Vinitiani) ancora che cio noto sia, non mi par' superfluo ridurlo in qualche parte a la memoria.
Jacques de Vintimille Guillaume Cappel Gaspard d'Auvergne Jacques Gohory
Touteffois si quelcun me demande dont il est advenu que l'Église soit parvenue à si grand bien temporel, veu que devant le règne d'Alexandre VI, les potentaz d'Italie, et non seullement ceulx qui se peuvent dire potentatz, mais chasque baron et seigneur bien petit, quant au temporel ne l'estimoit pas beaucoup. Mais à présent ung roy de France le craint bien fort, tellement ung pape seul l'a chassé hors d'Italie, et a peu mettre les Vénitiens en ruyne. Et combien que cela soit assez notoire, si est ce qu'il ne me semble hors de propos de reduyre en mémoire une partie des causes de tel accroissement. Neantmoins si quelcun me demandoit et pressoit dont vient cela que l'Eglise soit devenue si grande et si puissante en temporel, veu que devant Pape Alexandre les potentatz d'Italie et non pas seulement ceux qui s'appellent potentatz mais un petit baron un simple seigneur en faisoit peu de cas quand au temporel, maintenant soubz un Roy de France tremble d'elle, et peut le chasser d'Italie et ruiner les Venitiens : ce qu'encores qu'il soit assez commun, si est ce qu'il me semble n'estre pas impertinent de le reduire en partie en memoire. Neantmoins si quelqu'un me demandoit, d'ou est procedé, que l'Eglise soit, quant au temportel, venue à telle grandeur, attendu qu'auparavant Alexandre sixiesme les potentatz d'Italie, et non seulement ceux, qui s'appellent potentatz, mais tant petit baron ou seigneur qui eust peu estre, ne tenoit compte d'elle au regard de la temporalité, et depuis elle est devenue si puissante, qu'elle a peu ietter un Roy de France hors de l'Italie, avecques toute sa puissance, et abbaisser la reputation des Venitiens. Lesquelles choses bien que soient notoires. Si ne me semble il point superflu, de les reduyre aucunement en memoire. Neantmoins si quelqu'un me demandoit & pressoit, d'ou vient cela que l'Eglise soit devenue si grande & si puissante en temporel, veu que devant Pape Alexandre les potentatz d'Italie & non pas seulement ceux qui s'appellent potentatz mais un petit baron, un simple Seigneur en faisoit peu de cas quant au temporel, maintenant un Roy de France en tremble & le peut chasser d'Italie & ruiner les Venitiens : ce qu'encores qu'il soit assez commun, si est-ce qu'il ne me semble pas superflu de reduire en quelque partie en memoire.



Segment 6
Avanti che Carlo Re di Francia passassi in Italia, era questa provincia sotto l'Imperio del' Papa, Vinitiani, Re di Napoli, Duca di Milano, et Fiorentini.
Jacques de Vintimille Guillaume Cappel Gaspard d'Auvergne Jacques Gohory
Au paravant que Charles roy de France passast en Italie, toute la province estoit soubz l'empire du pape, des Vénitiens, roy de Naples, duc de Milan et des Florentins. Avant que le Roy Charles passast en Italie ce païs la estoit soubz le gouvernement du Pape, des Venitiens, Roy de Naples, Duc de Milan, et Florentins. Avant que le Roy Charles huitiesme passast en Italie, toute la province estoit divisée en subiection du Pape, des Venitiens, du Roy de Naples, du Duc de Milan, et des Florentins. Avant que le Roy Charles passast en Italie, le païs estoit sous le gouvernement du Pape, des Venitiens, du Roy de Naples, du Duc de Milan, & des Florentins.



Segment 7
Questi potentati havevano haver' due cure principali. L'una, che un' forestiero non intrassi in Italia con l' armi. L'altra, che nessun' di loro occupassi più stato.
Jacques de Vintimille Guillaume Cappel Gaspard d'Auvergne Jacques Gohory
Ces potentatz icy avoient deux principalles choses à penser, l'une qu'ung estrangier puissant en armes n'entrast en Italie, l'aultre que pas ung d'entre eulx n'occupast l'estat de son compaignon. Ces potentatz devoient prendre garde a deux choses, l'une qu'un estranger n'entrast point en Italie pour batailler, l'autre que nul d'eux usurpast plus de païs qu'il n'en tenoit. Ces cinq potentatz devoient avoir deux soings en principalle recommendation, l'un, d'empescher qu'un estranger n'entrast iamais en armes dans l'Italie l'autre, que nul d'eux dilasta plus outre les limites de son Empire. Ces potentatz avoyent a prendre garde a deux choses, l'une qu'un estranger n'entrast en Italie pour y mener guerre, l'autre que nul d'eux usurpast plus de païs qu'il n'en tenoit.



Segment 8
Quelli a chi s' haveva più cura erano il Papa et Vinitiani; et a tener' indrieto i Vinitiani, bisognava l'union' di tutti gli altri, come fù ne la difesa di Ferrara; et a tener' basso il Papa, si servivano de i Baroni di Roma, li quali essendo divisi in due fattioni, Orsini et Colonnesi, sempre v'era cagion' di scandoli fra loro, et, stando con l' armi in mano insù gli occhi del' Pontifice, tenevano el Pontificato debole et infermo.
Jacques de Vintimille Guillaume Cappel Gaspard d'Auvergne Jacques Gohory
Ceulx dont il se falloit plus donner de garde estoient le pape et les Vénitiens, pour reculler les Vénitiens il failloit que tous les autres soient uniz, comme il advint pour deffendre Ferrare et pour tenir le pape bas, ils se servoient des barons de Rome. Lesquelz estant divisez en deux factions et parties, l'une des Ursins, l'aultre des Colonoys, tousjours y avoit quelque cause de scandalle entre eulx, et ayant continuellement l'espée au poing sur les yeux du pape, ténoient le pontificat débile et sans force. Ceux qui en avoient plus d'interest estoient le Pape et les Venitiens, et pour tenir les Venitiens en subiection il falloit que tous les autres fussent d'acord comme avint a la defence de Ferrare. Pour tenir en bride le Pape ilz se servoient des barons de Romme, lequelz estans divisez en deux bandes, Ursins et Colonnois ilz estoient cause de scandales entre eux car aiants les armes au poing en presence du Pape ilz le faisoient plus foible et moins puissant. Ceux qui failloit plus reigler en cecy, estoient le Pape, et les Venitiens. Or pour brider les Venitiens, l'union de tous les autres ensemble suffisoit, comme l'on feit à la deffense de Ferrare. Quant a renger le Pape, ilz se pouvoient servir des barons de Rome, lesquelz estans divisez en deux diverses factions, Ursines, et Collonnoises, nourrissoient perpetuellement matiere de divorces, et esmeutes entr'eux : et consequemment se faisans tous les iours la guerre devant les yeux du Pape, debilitoient grandement son authorité : Ceux qui y avoyent plus d'interest estoyent le Pape & les Venitiens & pour tenir le Venitiens en sujection faloit que tous les autres fussent d'accord comme avint a la defence de Ferrare. Pour tenir en bryde le Pape ils se servoyent des barons de Romme, lesquels estans divisez en deux bandes, Ursins & Colonnois ilz estoient cause de seditions entr'eux, car ayants les armes au poing en presence du Pape ilz le rendoient plus foible & moins puissant.



Segment 9
Et benche surgessi qualche volta un' Papa animoso, come fù Sisto, pure la fortuna o il saper' non lo potè mai disobligare da queste incommodità.
Jacques de Vintimille Guillaume Cappel Gaspard d'Auvergne Jacques Gohory
Et jafoit qu'il nacquist quelque pape courageux, comme fut Sixte, touteffoys la fortune ou son sçavoir ne le purent jamais délivrer de ces incommoditez, Et bien qu'encores quelque fois il s'elevast un Pape courageux comme a este Pape Siste, si est ce que ny toute la fortune ny tout leur sçavoir ne les peut onques exempter de ces incommoditez, en sorte qu'encores il se trouvast parfois quelque Pape de coeur, et entreprise, comme sur Sixte, ce neantmoins la fortune, et le sçavoir ne le peut oncques depestrer de ceste incommodité : Et combien qu'encore quelquefois il s'elevast un Pape courageux comme a esté Pape Sixte, si est ce que ne toute la fortune ne tout leur savoir ne les peut onques exempter de ces incommoditez,



Segment 10
Et la brevità della vita loro n' era cagione, perche in .X. anni che, raguagliato, viveva un' Papa, affatica che potessi sbassare l'una de le fattioni, et se per modo di parlar' l'uno haveva quasi spenti i Colonnesi, surgeva un' altro inimico a gli Orsini, che gli faceva risurgere et non era a tempo a spegnerli.
Jacques de Vintimille Guillaume Cappel Gaspard d'Auvergne Jacques Gohory
dont la briefveté de leur vie en estoit la cause. Pource qu'en dix ans que à tout prendre ung pape vivoit, à grand peine pouvoit il abbatre l'une de ces parties, et si par manière de parler ung pape avoit destruict les Colonnoys, il s'en levoit après luy un autre ennemy aux Ursins, qui les faisoit revenir, et n'estoit jamais assez puissant pour les destruire du tout. la cause est qu'ilz vivoient trop peu. Car en dix ans que un Pape vivoit apres estre bien arreste et paisible, a grand peine pouvoit il apaiser une de ces factions, et si par maniere de parler, un Pape eust ruine les Colonnois il survenoit un autre ennemi des Ursins qui les faisoit relever et ne pouvoit abattre les autres. dont la briefveté de leur vie estoit la pluspart en cause : parautant que tout ce que pouvoit faire un Pape en dix ans, que le plus communément ilz vivoient, estoit de remettre ceux de son costé en egallité de vigueur à ses adversaires, sans qu'a peine le reste de son vivant suffist pour abbaisser la ligue contraire. Et si par maniere de dire l'un avoit anneanty le party des Colonnois, il en venoit successivement un autre ennemy des Ursins, qui les faisoit ressusciter : auquel toutefois le temps estoit semblablement trop court, pour adnichiller du tout la faction Ursine. la cause est qu'ils vivoyent trop peu. Car en dix ans qu'un Pape vivoit aprez estre bien arresté & paisible, à grande peine pouoit il assoupir une de ces factions, & si par maniere de parler, un Pape eust ruiné les Colonnois il survenoit un autre ennemy des Ursins qui les faisoit relever & ne pouoit abbatre les autres.



Segment 11
Questo faceva che le forze temporali del' Papa eron' poco stimate in Italia.
Jacques de Vintimille Guillaume Cappel Gaspard d'Auvergne Jacques Gohory
Dont il advenoit que les forces temporelles du pape n'estoient pas fort estimées en Italie. Cela faisoit que les forces temporelles du Pape estoient bien peu estimees en Italie. Celà causoit, que la puissance temporelle du Pape estoit pour lors peu estimée en Italie. Cela faisoit que les forces temporelles du Pape estoyent bien peu estimées en Italie.



Segment 12
Surse di poi Alessandro Sesto, il qual', di tutti li Pontefici che son' stati mai, mostrò quanto un' Papa et con il Danaio et con le forze si poteva prevalere, et fece, con l'instrumento del' Duca Valentino et con l'occasion' de la passata de Francesi, tutte quelle cose che io ho discorse disopra ne l'attioni del' Duca.
Jacques de Vintimille Guillaume Cappel Gaspard d'Auvergne Jacques Gohory
Depuis se leva pape Alexandre VI lequel sur tous les papes que jamais furent, monstra combien ung pape se pouvoit faire valoir par force des deniers et des armes. Car ayant le duc Valentin son filz pour instrument et conducteur de ses entreprinses, prenant occasion sur la venue des Françoys, feit toutes les choses que j'ay cy dessus discourues en racomptant les gestes du duc Borgia. Depuis s'eveilla Alexandre Sixiesme, lequel entre tous les Papes qui furent iamais, a bien monstre combien un Pape pouvoit par argent ou par force se faire valoir, et par moien du Duc Valentin, et a l'occasion de la descente des François en Italie. Or fit il toutes les choses que i'ay dites en parlant des fais de Borge. Depuis Alexandre sixiesme se meit en avant, lequel, de tous ses predecesseurs qui furent oncques monstra le mieux ce qu'un Pape pouvoit faire employant le denier, et la force : comme il le declara tresbien es gestes, qu'il feit par les mains du Duc son filz, et moyennant l'occasion, dont il se sçeut fort bien servir à la venue des Françoys, tout ainsi que i'ay cy dessus racompté, parlant des affaires de Cesar Borgia. Depuis s'eveilla Alexandre sixieme, lequel entre tous les Papes qui furent iamais, a bien monstré combien un Pape pouoit par argent ou par force se faire valoir, & par moyen du Duc Valentin, & à l'occasion de la descente des François en Italie. Or fit il toutes les choses que i'ay dites en parlant des gestes faitz de Borge.



Segment 13
Et benche l'intento suo non fusse di far' grande la Chiesa, ma il Duca, nondimeno ciò che fece tornò a grandeza de la Chiesa, la qual, doppò la sua morte, spento el Duca, fù herede de la fatiche sue.
Jacques de Vintimille Guillaume Cappel Gaspard d'Auvergne Jacques Gohory
Et jafoit que son intention ne fust pas d'agrandir l'Église, mais son filz seullement, touteffoys ce qu'il feit tourna à la grandeur de l'Église, laquelle après sa mort et celle du duc, fut heritière de ses travaulx. Et bien que son intention ne fut pas de mettre cela au proffit de l'eglise, mais de son filz : neantmoins cela qu'il fit tourna a la grandesse de l'eglise, laquelle apres la mort du Pape et de son fis fut heritiere de ses peines et fascheries. Et combien que son intention fust d'agrandir son dit filz, non pas l'Eglise : si retournerent pourtant ses conquestes à l'augmentation d'icelle, qui succeda apres sa mort, et la ruyne du Duc, au profit de toutes ses peines et conquestes. Et combien que son intention ne fust pas de mettre cela au proufit de l'eglise, mais de son fils : neantmoins ce qu'il fit tourna à la grandesse d'icelle, laquelle apres la mort du Pape & de son filz fut heritier de ses peines & travaux.



Segment 14
Venne dipoi papa Iulio et trovò la Chiesa grande, havendo tutta la Romagna, et essendo spenti tutti li Baroni di Roma et, per le battiture d'Alessandro, annullate quelle fattioni, et trovò ancor' la via aperta al' modo del' raccumular' denari, non mai più usitato d'Alessandro indrieto.
Jacques de Vintimille Guillaume Cappel Gaspard d'Auvergne Jacques Gohory
Après luy fut crée pape qui trouva l'Église puissante dame de toute la Romaigne, les barons de Rome destruictz, les factions et partialitez de Rome toutes anéanties, par les continuelles batteries d'Alexandre, et trouva d'abondant la voye faicte de faire deniers qui n'avoit jamais estée usitée auparavant qu'Alexandre la meist en oeuvre. Succeda Pape Iules 2. et trouva l'eglise ia fort puissante ayant toute la Romagne, les barons de Romme tous ruinez, et les factions abolies, tant avoyent este batus d'Alexandre, encores trouva il le chemin ouvert, et moyen pour amasser deniers qui n'avoit iamais este pratique devant Alexandre. Apres luy Iulles second vint à la papauté, lequel trouva l'estat de l'Eglise fort opulent, ayant toute la Romaigne subiete, et estans ces barons de Rome entierement mis soubz le pié, ensemble leurs factions annullées par les persecutions, et menées d'Alexandre. Il rencontra aussi la porte ouverte à nouvelles inventions d'amasser deniers, non pratiquées auparavant Alexandre : Succeda Pape Iules 2. & trouva l'eglise ia fort puissante ayant toute la Romagne, les barons de Romme tous ruinez, & les factions abolies, tant avoyent esté battus par Alexandre, encores trouva il le chemin ouvert & moyen d'amasser deniers qui n'avoit iamais esté pratiqué avant Alexandre.



Segment 15
Le qual' cose Iulio non solamente seguitò, ma accrebbe, et pensò guadagnarsi Bologna et spegner' Vinitiani et cacciar' i Francesi d' Italia; et tutte queste imprese gli riuscirno, et con tanta più sua laude, quanto fece ogni cosa per accrescer' la Chiesa et non alcun' privato.
Jacques de Vintimille Guillaume Cappel Gaspard d'Auvergne Jacques Gohory
Lesquelles choses non seullement le pape ensuyvit, mais les augmenta bien fort. Car il se délibéra de conquester Boulogne, repoulser les Vénitiens, et chasser les Françoys hors d'Italie, et vint au dessus de toutes ces entreprinses, et d'autant plus cela redonda à sa grande louenge, qu'il le faisoit en l'intention d'accroistre l'Église et non aucun particulier amy. Ce que Pape Iules non seulement continua, mais augmenta : mettant en sa teste d'avoir Boulongne, de ruiner les Venitiens, et de chasser les François. Lesquelles entreprinses vindrent toutes a bien et avec tant plus de louange, d'autant qu'il fist tout ce qu'il estoit possible pour acroistre l'eglise et non pas quelque autre tiers. lesquelles Pape Iulle non seulement ensuivit mais les accreut grandement : et se proposa de gaigner Bouloingne, roigner les aisles des Venitiens, et chasser les Françoys de l'Italie. Dont il vint heureusement à bout, avec d'autant plus de louanges, qu'il entreprenoit ces choses pour l'accroissance de l'Eglise, et non d'aucun particulier. Ce que Pape Iules non seulement continua, mais augmenta : mettant en sa teste d'avoir Boulongne, de ruiner les Venitiens & de chasser les François. Lesquelles entreprinses eurent toutes succez & avec tant plus de loüange, d'autant qu'il fit tout ce qu'il estoit possible pour acroistre l'eglise & non pas quelque autre tiers.



Segment 16
Mantenne ancor' le parti Orsine et Colonnese in quelli termini che le trovò.
Jacques de Vintimille Guillaume Cappel Gaspard d'Auvergne Jacques Gohory
Si maintint aussy les parties Oursines et Colonnoyses en l'estat qu'il les trouva. Outre cela il maintint les factions des Ursins et Colonnois comme il les avoit trouvees. Outreplus il rengea tousiours les partialitez Ursines, et Coulonnoises à la raison, qu'il les avoit trouvées. Outre cela il maintint les factions des Ursins & Colonnois comme il les avoit trouvées.



Segment 17
Et benche tra loro fussi qual'che capo da far' alteratione, nientedimeno due cose gli ha tenuti fermi: l'una, la grandeza de la Chiesa che gli sbigotisce ; l'altra, il non haver' loro Cardinali, quali sono origine de tumulti intra loro: ne mai staranno quiete queste parti qualunque volta habbino Cardinali, perche questi nutriscono, in Roma et fuori, le parti. Et quelli Baroni son' forzati a defenderle, et cósì, da l' ambition' de Prelati, nascono le discordie et tumulti intra Baroni.
Jacques de Vintimille Guillaume Cappel Gaspard d'Auvergne Jacques Gohory
Entre lesquelles combien que tousjours y aist quelque chef pour faire quelque brouilliz, si est ce qu'ilz se tindrent coy, pour deux causes : l'une pour la puissance de l'Église qui les espoventoit, l'aultre pource qu'ilz n'avoient plus leurs cardinaulx qui sont tousjours la cause et l'embrasement des tumultes entre eulx. Et ne fault penser que ces partialitez soient jamais en paix et tranquillité pendant qu'ilz auront des cardinaux. Car ce sont ceulx qui nourrissent dedans et dehors de Rome les partisans, tellement que les barons sont contraictz de les défendre, et par ainsy toutes les discordes et brouilleries des barons naissent de l'ambition des prélatz. Et bien que ilz eussent un chef entre eux pour renouveler quelque trouble, toutefois deux points les ont tenuz en crainte, l'un est la grandeur de l'eglise qui les estonnoit, l'autre qu'ilz n'avoyent point de Cardinaux des leur, car c'est la source des tumultes entre eulx, et iamais ces deux bandes ne seront bien appaisees, toutes et quantes fois qu'elles auront ung Cardinal de leur coste : car sont ceux qui nourrissent et en Romme, et dehors les parties et factions, les seigneurs etans contraints de les defendre, ainsi par l'ambition de ces Prelatz les discordes et noises sourdent entre les barons. Et encores qu'il s'eslevast parmi eux quelque autheur de nouvelle sedition, est ce que deux causes les feirent tousiours reserrer, l'une, la grandeur de l'Eglise, qui les tenoit en crainte, l'autre se voyans sans Cardinal de leur party : dont tous leurs troubles, et differens ont cy devant pris, et le plus souvent prennent origine : ny ne seront iamais en repos tant qu'il y aura Cardinal en l'une de ces deux bandes : parce que soubz ce moyen ilz entretiennent leurs partisans dans la ville de Rome, et dehors. Et les Gentilz-hommes sont forcez d'adherer a eux. De maniere que par là congnoist on les discordes, et tumultes naistre de l'ambition des prelatz. Et neantmoins qu'ils eussent un chef entre eux pour renouveler quelque trouble, toutesfois deux poins les ont tenuz en crainte, l'un est la grandeur de l'eglise qui les estonnoit, l'autre qu'ils n'avoyent point de Cardinaux des leur ligue, car c'est la source des tumultes entre eux, & iamais ces deux bandes ne seront bien assoupies, toutes & quantesfois qu'elles auront un Cardinal de leur costé : car sont ceux qui nourrissent & a Romme & dehors les partialitez, les Seigneurs estans contraints de les defendre : ainsi par l'ambition de ces Prelatz, les discordes & debatz sourdent entre les barons.



Segment 18
Ha trovato adunque la Santita di Papa Leone questo Pontificato potentissimo, del' qual' si spera che se quelli lo fecero grande con l'armi, esso con la bontà et infinite altre sue virtù lo fara grandissimo et venerando.
Jacques de Vintimille Guillaume Cappel Gaspard d'Auvergne Jacques Gohory
Puys doncques que la saincteté de pape Léon à présent a trouvé le pontificat trespuissant, tout le monde s'est esmeu en quelque espérance de quelque grand bien, dont chacun espère, que tout ainsy que les autres devant luy l'ont agrandy par armes, il le fera tresgrand et vénérable par la bonté et plusieurs autres grandes vertuz. Or maintenant la saintete de pape Leon a trouve cette Papaute fort puissante, duquel on espere tant que si les autres l'ont fait grande par les armes, luy par sa bonte, et autres vertuz infinies luy donnera tresgrande force et reputation. Or maintenant la saincteté de Pape Leon a trouvé le pontificat merveilleusement riche : duquel nous esperons, que si ses predecesseurs l'ont augmenté par les armes, cestuy cy l'accroistra d'advantage par la bonté, se rendant à la parfin grand et venerable par infinies siennes vertuz. Or maintenant la sainteté de Pape Leon a trouvé cette Papauté fort puissante, duquel on espere tant que si les autres l'ont fait grande par les armes, luy par sa bonté & autres vertuz infinies en accroistra sa grandeur & veneration.